Page 12 - La Rumeur 9-4 Lucien Blanchette
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         LE ROUET (ÉVOLUTION D’UN APPAREIL ANCIEN)

                                               e
             l nous faut remonter jusqu’au X11  siècle de       Dans  les                         cam-
         I notre ère et jusqu’en Chine pour retracer les
         premiers modèles de cet instrument de filage de
         la laine et du lin. C’est là à cette époque, qu’ap-
         paraît la première ébauche du rouet dit «rouet à
         main». Aussi rudimentaire qu’il fût, c’était un net
         progrès  par  rapport  au  fuseau  utilisé  jusque  là
         depuis des temps immémoriaux.

             Plus tard en Europe, c’est à Venise plus pré-
         cisément, que le rouet fait son apparition vers l’an
         1224. Serait-ce Marco Polo, au cours de ses ex-                      Rouet traditionnel
         péditions  en  Asie,  qui  aurait  recueilli  ce  curieux  pagnes   du                   Québec,
         instrument  et  l’aurait  introduit  en  Europe?  Tou-  chaque  cultivateur  possédait  son  petit  troupeau
         jours  est-il  qu’il  devint  très  populaire  en Italie  et  de moutons pour subvenir aux besoins de la fa-
         en France et dans tout le continent et il fallut peu  mille, en laine principalement. Chez nous, on ne
         de  temps  pour  que  l’ingéniosité  d’un  artisan  lui  faisait  pas  exception  et  chaque  printemps  avait
         apporte quelques améliorations. C’est ainsi qu’en  lieu  la  tonte  des  moutons  avec  les  «forces»  et
         l’an 1300, un habile travailleur dont le nom s’est  plus  tard  avec  le  «clipper»,  la  tondeuse  élec-
         perdu y ajouta une «canette», sorte de petite bo-  trique. Il fallait ensuite laver la laine et l’apporter à
         bine pour l’enroulement de la laine filée.

             Par la suite, nous retrouvons en Allemagne,
         vers  l’an  1470,  le  rouet  à  ailettes.  Pendant
         quelques  siècles,  ce  fut  le  modèle  utilisé  dans
         toutes  les  campagnes.  Ici,  dans  nos  paroisses,
         nos mères et nos grands-mères, toutes nos an-
         cêtres ont filé la laine et le lin, avec lesquels elles
         ont  tissé  et  tricoté  une  grande  partie  des  vête-
         ments,  des  couvertures  de  lits,  etc.  en  usage
         chez nous.

             Puis, ce fut la révolution industrielle qui vint
         chambarder  le  mode  de  vie  traditionnel.  Face  à
         l’augmentation de la demande de fil de coton les
         rouets  existants  ne  pouvaient  plus  suivre  la  ca-
         dence.  C’est  là  qu’en  Angleterre,  en  1764  que
         James  Hargreaves  un  tisserand  et  charpentier
         inventa la «Spinning Jenny», une machine à filer,
         ce qui a considérablement multiplié la productivi-
         té.  De  cette  façon,  en  1800,  ce  nouvel  appareil
         est concurrencé par la «Mull Jenny», qui pouvait
         filer jusqu’à trente brins à la fois, et qui a définiti-
         vement  mis  fin  à  l’usage  du  rouet  traditionnel
         dans  les  chaumières.  Mais  pas  tout  à  fait!
         Chez  nous spécialement, en raison de circons-
         tances  particulières  de  notre  histoire,  dans  nos
         campagnes québécoises, le rouet a continué de
         ronronner  allègrement  pendant  un  bon moment.
         C’est ainsi que pendant mon enfance, j’ai pu as-
         sister à une scène que je vous décris à l’instant :


                                                                     Copie de la délivrance d’un brevet
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