Page 6 - La Rumeur 4-2 Monique Lemaire
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Page 6 La Rumeur
Les visiteurs inattendus
Prenons quelques instants pour réfléchir sur ce conte de Noël d’après un poème de Helen Steiner
iméon, le vieux cordonnier, vivait seul dans pas d’un visiteur. « C’est Lui! ». Vitement, il
S un petit village perdu au creux des Ro- ouvre toute grande la porte. C’est un passant,
cheuses. Ses deux enfants partis pour les États ne affamé, vieilles bottines aux pieds, manteau
lui écrivaient pas souvent. Sa femme, depuis troué sur le dos. Ému, le vieux Siméon lui donne
longtemps, l’avait quitté pour un ciel plus serein. ses propres chaussettes et quelques vêtements
La franche et cordiale hospitalité du vieux Si- plus chauds.
méon lui avait mérité l’estime de tout le monde.
Les douzes coups de minuit depuis long-
Or voici que la nuit précédant Noël, le Christ temps se sont éteints dans la nuit. Déçu, épuisé,
Jésus lui apparaît en le vieux cordonnier tombe
songe : « Siméon ! dans un profond sommeil.
Siméon ! Ce soir, Soudain, il sursaute, ses yeux
c’est Noël. Je viens ont peine à soutenir la lu-
chez toi ». mière éclatante qui baigne sa
maison. Une voix très douce
Le cœur plein appelle le vieux Siméon. Il la
d’une sainte joie, le reconnaît : c’est le divin Visi-
sympathique cordon- teur!
nier nettoie la bou- - Siméon!
tique, prépare le re- Siméon!
pas, déblaie la der- - C’est toi,
nière neige, décore Jésus?
l’humble cabane. - Oui, Si-
Tout est prêt pour méon!
accueillir dignement - Seigneur,
le divin visiteur. pourquoi n’es-tu pas venu?
J’ai attendu en vain toute la
Voilà qu’aux nuit. Pour toi, j’avais tout
coups de l’horloge, Siméon entend frapper à la préparé, nettoyé, décoré. Je désirais tant te voir.
fenêtre. Il accourt, ouvre la porte; c’est un enfant
tout en pleurs qui cherche sa mère. Vitement le - Mais, Siméon, relève la tête.
vieux Siméon rassure l’enfant et se hâte de le J’ai tenu promesse! À trois reprises, ce soir, j’ai
reconduire à ses parents. franchi le seuil de ta porte. À trois reprises, tu
m’as accueilli : l’enfant tout en pleurs, la grand-
Le vieux cordonnier attend toujours avec mère toute transie, le mendiant affamé, c’était
hâte l’invité de marque, lorsqu’on frappe à nou- MOI!…
veau à la porte. Entre alors une vieille grand-
mère, toute courbée sous les ans et grelottante. (Texte recueilli par Yolande Plasse)
« L’hospitalité, monsieur, pour l’amour de
Dieu! » La chambre d’hôte est bien prête, mais
ce sera pour le céleste Visiteur. Pris de pitié, Si-
méon offre à la vieille grand-mère un bon thé
bien chaud et quelques galettes.
L’horloge égrène encore les heures, lors-
qu’une troisième fois, le vieux Siméon devine le

