Page 51 - L'immobilier au cœur - Alexandra François-Cuxac
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effets pervers : le présupposé selon lequel les HLM créent de
la mixité sociale au sein même de leur parc, en y logeant aussi
des classes moyennes. Ainsi s’explique le fait que les plafonds de
ressources leur permettent de couvrir près de 80 % de la popu-
lation. Telle que je la comprends, cette couverture très large sert
deux objectifs : dégager une forme de rentabilité sur une partie
de leur parc, ce qui permet de compenser le déficit sur le reste
(lié à la faiblesse des loyers et aux surcoûts de gestion associés
au suivi de leurs locataires les plus fragiles) ; et mélanger les
publics au sein même du parc HLM, pour éviter de constituer
des ghettos. Or la part du logement social dans le parc existant
n’est pas supérieure en France à ce qu’elle est en Allemagne ou
en Grande-bretagne – un peu moins d’un logement sur cinq, soit
4,8 millions. Dès lors, l’application de plafonds de ressources
élevés a mécaniquement pour effet de réduire la part de ces
logements consacrée à des ménages modestes et fragiles par
rapport à nos voisins – au détriment, in fine, d’un grand nombre
d’entre eux, dont les demandes ne peuvent pas être satisfaites,
ou au terme d’une attente de plusieurs années qui contraste
avec le besoin de mobilité rapide né du marché du travail actuel.
Au demeurant, en ouvrant à 80 % de la population un parc HLM
qui représente moins de 20 % du parc total, on crée une forme
d’aubaine pour ceux qui sont sélectionnés – dans des conditions
de transparence qui certes s’améliorent, mais qui n’en créent
pas moins un filtre, ce qui soulève une vraie question de justice
sociale.
Les deux arguments qui conduisent à justifier cette « banalisa-
tion » des organismes HLM et leur vocation très généraliste sont
contestables.
L’équilibre de financement des HLM ne doit pas passer par une
compensation du mauvais risque par le bon au sein même de
leur parc, mais par un financement public à l’échelle des besoins
sur les ménages-cibles. Il en va de l’intérêt général de loger des
ménages défavorisés, c’est donc à la solidarité nationale d’en
supporter la charge.
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